Soutenance de thèse de Vincent ORY

Ecole Doctorale
ESPACES, CULTURES, SOCIETES - Aix Marseille
Spécialité
Archéologie
établissement
Aix-Marseille Université
Mots Clés
Fortifications côtères,Premièrepremières fortifications modernes,Artillerie,Empire ottoman,Grèce,Turquie.
Keywords
Coastal fortifications,Early modern fortifications,Artillery,Ottoman Empire,Greece,Turkey
Titre de thèse
Défendre l’empire par la mer ? La fortification côtière ottomane en Méditerranée orientale (1451 - 1550)
Defending the empire by the sea? The Ottoman coastal fortification in the Eastern Mediterranea (1451 - 1550)
Date
Vendredi 26 Mars 2021
Adresse
Maison méditerranéenne des sciences de l'homme, 5 Rue Château de l'Horloge, 13090 Aix-en-Provence
Salle George Duby
Jury
Directeur de these M. Nicolas FAUCHERRE Aix Marseille Université
Rapporteur M. Philipe BRAGARD Université catholique de Louvain
Rapporteur M. Stavros MAMALUKOS Department of Architecture University of Patras
Examinateur Mme Ege ULUCA TüMER Eastern Mediterranean University
CoDirecteur de these M. Andreas HARTMANN-VIRNICH Aix-Marseille Université

Résumé de la thèse

Cette thèse propose de caractériser les formes que prennent les fortifications côtières ottomanes, au moment où l’usage de l’artillerie devient massif, et de déterminer leur évolution sur une période d’environ un siècle, à travers l’étude de dix ouvrages érigés entre l’avènement de Mehmet II et les dernières années du règne de Soliman le Magnifique. Cette série de monographies, réunies dans un volume indépendant (vol. III), vient nourrir la typologie formelle qui constitue le corps du volume de texte (vol. I), auquel s’ajoute un volume annexe contenant un glossaire et les illustrations (vol. II). De 1451 à 1566, les sultans ottomans vont étendre leur empire sur trois continents — l’Europe, l’Asie et l’Afrique — grâce à une organisation administrative, économique et logistique centralisée, et à une armée de métier permanente, experte dans le maniement de l’artillerie et dans l’art du siège. La période est en effet marquée, dans toutes les principautés européennes en gestation, par une rupture technologique liée à la généralisation de la poudre explosive et de l’artillerie inhérente, qui entraine un changement radical des pratiques militaires. Sur mer, au tournant du XVIe s., l’introduction de canons de bronze à boulet métallique, embarqués sur des galères de guerres, puis sur des navires à voiles restructurés pour les recevoir, offre au vaisseau la possibilité de faire brèche dans le fort, donnant un nouveau rôle à la marine dans l’attaque. A contrario, l’augmentation de la portée effective de l’artillerie lourde offre également des possibilités nouvelles à la terre, en autorisant le verrouillage de chenaux maritimes jusque-là incontrôlables depuis la côte. L’Empire ottoman, dont la puissance militaire est foncièrement continentale, ne paraît pas avoir disposé d’une vision géostratégique en Méditerranée. Sa flotte, qui peine à se développer, ne parvient ainsi à obtenir la maîtrise de la mer que sur un très court laps de temps, de la victoire de Préveza en 1538 à la défaite de Lépante en 1571. Le sultan de Mehmet II à Soliman, est dès lors contraint de fortifier les côtes de son empire, pour garantir la sécurité de sa capitale et de points stratégiques que sa marine n’est pas en mesure d’assurer. Au sortir du Moyen Âge, les architectes et les ingénieurs du sultan construisent des forts spécialement conçus pour surveiller les côtes et battre la mer — forts à la mer de tenaille pour les détroits, bourtzi (fort isolé) pour les entrées de ports, enceintes portuaires — et mettent en place les nouvelles solutions de la fortification moderne : batterie côtière pratiquant des tirs rasants à couler, tour d’artillerie à plate-forme et rampe de roulage, ouverture de tir dédiée, ventilation de casemate. Les formules adoptées dans le monde ottoman, qui puise leurs sources d’inspiration autant vers l’est (mondes indiens) que vers l’ouest (mondes européens) constituent des réponses cohérentes mais diversifiées à la puissance de feu de l’artillerie embarquée, à l’image d’un empire éclaté, sans que l’on puisse affirmer la part d’innovation propre, le rôle d’ingénieurs renégats venus d’ailleurs.

Thesis resume

This thesis proposes to characterise the forms taken by the Ottoman coastal fortifications, at the time when the use of artillery became massive, and to determine their evolution over a period of about a century, through the study of ten works erected between the advent of Mehmet II and the last years of the reign of Suleiman the Magnificent. This series of monographs, brought together in an independent volume (vol. III), feeds into the formal typology that constitutes the body of the text volume (vol. I), to which is added an appended volume containing a glossary and illustrations (vol. II). From 1451 to 1566, the Ottoman sultans extended their empire over three continents - Europe, Asia and Africa - thanks to a centralised administrative, economic and logistical organisation and a permanent professional army, expert in the handling of artillery and the art of siege. The period was indeed marked, in all the emerging European principalities, by a technological breakthrough linked to the generalisation of explosive powder and inherent artillery, which led to a radical change in military practices. At sea, at the turn of the 16th century, the introduction of bronze cannons with metal cannonballs, which were embarked on war galleys and then on sailing ships restructured to receive them, offered the ship the possibility of breaching the fort, giving the navy a new role within the attack. On the other hand, the increase in the effective range of heavy artillery also offers new possibilities to the land, by allowing the blocking of maritime channels hitherto uncontrollable from the coast. The Ottoman Empire, whose military power is abasically continental, does not seem to have had a geostrategic vision in the Mediterranean. Its fleet, which was struggling to develop, thus only managed to gain control of the sea in a very short space of time, from the victory of Préveza in 1538 to the defeat of Lepanto in 1571. The Ottoman sultan, from Mehmet II to Suleiman, was therefore forced to fortify the coasts of his empire, to guarantee the security of his capital and strategic points that his navy was unable to provide. At the end of the Middle Ages, the Sultan’s architects and engineers built forts specially designed to watch over the coasts and beat the sea - pincer sea forts for the straits, bourtzi (isolated fort) for the port entrances, port enclosures - and implemented the new solutions of modern fortification: coastal battery with sinking low firing, artillery tower with platform and rolling ramp, dedicated firing aperture, casemate ventilation. The formulas adopted in the Ottoman world, which draws its sources of inspiration as much to the east (Indian worlds) as to the west (European worlds), constitute coherent but diversified responses to the firepower of the on-board artillery, in the image of a shattered empire, without being able to affirm the share of innovation proper, the role of renegade engineers from elsewhere.