Soutenance de thèse de Abdoul-malik AHMAD

Ecole Doctorale
ESPACES, CULTURES, SOCIETES - Aix Marseille
Spécialité
Sociologie
établissement
Aix-Marseille Université
Mots Clés
Femmes migrantes,commerce à la valise,marché du travail,transnationalisme,Communauté comorienne,
Keywords
Migrant women,suitcase commerce,labor market,transnationalism,Comorian community,
Titre de thèse
Agencéité et stratégies des "plus faibles" : les femmes comoriennes dans le commerce à la valise
Agency and strategies of the "weakest": Comorian women in the suitcase commerce
Date
Vendredi 26 Avril 2019 à 14:00
Adresse
LEST - Laboratoire d'Economie et de Sociologie du Travail 35,avenue Jules Ferry 13626 Aix-en-Provence
Grande salle 1er étage
Jury
Directeur de these Mme Annie LAMANTHE Laboratoire d'Economie et de Sociologie du travail (Lest) - Aix-Marseille Université
Rapporteur Mme Swanie POTOT Unité de Recherche Migrations et Société (URMIS) - CNRS
Rapporteur M. Brahim LABARI Laboratoire Interdisciplinaire des Sciences Sociales - Université d'Agadir
Examinateur Mme Delphine MERCIER Laboratoire d'Economie et de Sociologie du Travail (Lest) - CNRS
Examinateur M. Michel PERALDI Institut de Recherche Interdisciplinaire sur les Enjeux Sociaux (IRIS) - CNRS

Résumé de la thèse

Cette thèse prend pour objet les parcours biographiques de femmes migrantes comoriennes installées à Marseille qui réalisent des activités de commerce à la valise en parcourant plusieurs places marchandes européennes, asiatiques et africaines à la recherche de produits dits du pays, pour les usages domestiques dans les deux espaces sociaux d’ancrage et pour les festivités traditionnelles « ici » en migration et « là-bas » dans le pays d’origine. L’objectif de cette thèse est d’analyser l’agency (capacités d’action et d’organisation) de femmes migrantes engagées dans une activitéì économique transnationale et confrontées àÌ des structures de contraintes et de domination plurielles en raison du sexe, de la classe, de la « race » et de « l’âge » (système traditionnel des âges sociaux). En d’autres termes, nous cherchons à mettre en évidence comment des individus pluri-dominés, en l’occurence ici des femmes migrantes, se servent et « jouent » de leurs positions subalternes comme levier pour mettre en place des stratégies d’action qui peuvent les amener à contester, contourner ou renforcer les ordres normatifs dominants. Trente entretiens biographiques, complétés par des observations directes des lieux de vente, des réseaux de clientèle et au sein des tontines, espaces de mobilisation des fonds économiques nécessaires au financement du commerce ont été réalisés. Ce travail de recherche se construit sur deux hypothèses complémentaires : la première hypothèse est que les circulations commerciales de ces femmes participent à la mise en place de formes de multi-appartenances dans un espace pluridimensionnel au sein duquel les individus circulent sur des modes variés, construisent des réseaux transnationaux et se constituent des assemblages de dispositifs économiques intermédiaires « partiellement emboités dans des institutions économiques locales » (Rouleau-Berger, 2010 : 134). Ce commerce transnational qui se cristallise au travers de va-et- vient plus ou moins soutenus a certes des enjeux économiques de capitalisation, mais nous formulons l’hypothèse de leur orientation vers des enjeux sociaux et symboliques (enjeu de position sociale, de capital social, de prestige et de reconnaissance sociales). D’un point de vue théorique et épistémologique, face aux perspectives migratoires « victimaires » qui ne mettent pas assez en avant les initiatives des femmes qui ne sont pas que des « réceptacles passifs » (migrantes « victimes » de la traite des êtres humains ou l’exploitation des travailleuses domestiques et du care), nous considérons les femmes comoriennes comme des actrices dotées de ressources, capables de déployer des stratégies ou des tactiques de résistance ou d’adaptation. Notre démarche consiste à interroger l’agentivité ou agency entendue comme la capacité à mobiliser et utiliser ses ressources et à agir de façon autonome (Giddens, 1984). Il ne s’agit nullement de les considérer comme des acteurs sociaux totalement autonomes ni totalement déterminés : ces migrantes font face certes à des déterminations et des contraintes sociales multiformes, mais elles disposent de marges de manoeuvre, des compétences et des « arts de faire » (De certeau, 1990) leur permettant des capacités d’action et d’organisation telles que le commerce transnational. Le concept d’agency permet de tenir compte du « potentiel créatif des individus et des groupes agissant face aux limitations sociales » (Strauss, 1992 : 270).

Thesis resume

This thesis deals with the histories of Comorian women engaged in a suitcase trade. Most of these women are in atypical employment (most as cleaners in the hotel trade, industry or the service sector), which they combine with transnational suitcase trade. This business activity consists of buying various products (food, ready-to-wear clothes, beauty products, cheap shoes, kitchen utensils, etc.), which they sell in France mainly to Comorian customers. This implies taking the time to travel to public squares and markets stretching from the Mediterranean basin to the Middle East (United Arab Emirates), the Far East (China) and "village roads" (Peraldi, 2001) in East Africa (Kenya, Tanzania and Madagascar). The business is run in tandem with their formal activity in terms of the time freed up by taking advantage of the "porosity" of their insecure job’s working hours and the resources that this job gives them. The purpose is to analyse the agency of migrant women engaged in transnational economic trade. How they act and organize themselves vis-à-vis normative structures and intersectional forms of domination based on their gender, class, "race" and "age" (traditional system of social ages ? In other words, we aim to show how pluridominated individuals, here migrant women, can sometimes use their subordinate positions to challenge, circumvent or reinforce the prevailing normative orders.